Une architecture métisse
Au Sénégal, l’architecture de l’époque coloniale n’est pas homogène. En premier lieu, elle a été produite sur une très longue période s’étalant sur plus de trois siècles. En second lieu, elle est très différente, malgré les apparences, selon que l’on parle de Gorée, de Saint-Louis, de Rufisque ou de Dakar.
On a généralement tendance à évoquer l’architecture coloniale, or il convient de distinguer l’architecture strictement coloniale, produite par les colons, à l’instar du fort, de la cathédrale et même de la mosquée de Saint-Louis, de l’architecture civile, généralement indigène ou métisse. Dans cette dernière catégorie, on peut citer la célèbre Maison des esclaves de Gorée ou l’habitat bourgeois saint-louisien, conçu et réalisé par les négociants mulâtres et les signares, inspirés de modèles occidentaux et adaptés au contexte et aux goûts locaux.
En outre, cette architecture varie effectivement d’une ville à l’autre, non pas tant en raison de leurs influences culturelles respectives qu’en raison de leurs fonctions distinctes (défensive pour Gorée, commerciale pour Saint-Louis) et des matériaux disponibles sur place (pierre de basalte à Gorée, brique cuite à Saint-Louis, pierre de Rufisque à Rufisque). Des matériaux importés s’ajoutent aux précédents : bois de pitchpin provenant d’Amérique du Nord, trachy andésites des Canaries, tuiles rouges de Marseille, poutrelles métalliques, etc.
L’architecture de l’époque coloniale au Sénégal est aujourd’hui menacée de disparition, en raison de la spéculation, de la pression foncière et de la méconnaissance des autorités et des habitants. Les techniques, les savoir-faire et les matériaux de l’époque ont progressivement disparu. L’architecture est pourtant un élément décisif dans le choix du classement au patrimoine mondial de l’Unesco de l’île de Gorée (en 1979) et de l’île Saint-Louis (en 2000).